Le coronabitus de Benjamin Polanski
Texte un peu poil à gratter, où l’actualité et les tréfonds putrides de l’âme humaine font le lien entre deux livres de développement personnel. Désolée Gounelle d’utiliser ces ponts infects entre deux de tes romans élévateurs d’âme.
A Noël, un cadeau de collègue porte à mes yeux un ancien roman de mon auteur du moment : Le jour où j’ai appris à vivre. Dans une fibre typiquement Gounellienne, le roman propose un parcours de développement de l’humain au travers d’émotions positives, de bonté et d’empathie, des mots parfois vidés de leur substance dans notre quotidien où prévalent l’égocentrisme, la négation des émotions et l’individualisme. Outre la joie de voir un homme incarner pleinement son humanité et y trouver son épanouissement, je me délecte de voir ce livre aborder des thèmes qui sont chers à mon cœur et nourrissent mon positionnement professionnel.
Gounelle y décrit très bien comment la société, avec ses injonctions de perfection, de réussite, de consommation crée en nous le manque, l’insatisfaction et le sentiment d’incomplétude, fabriquant à la chaîne des dépendants affectifs, des envieux, des déprimés. La satisfaction des désirs – cherchant inlassablement et frénétiquement à se procurer du bonheur par des achats, des possessions, des réussites – semble être un modèle erroné, nourrissant seulement un égo qui entretient cette spirale infernale. Mais loin de prôner comme solution le remède faussement miracle de tant d’hommes aujourd’hui – le fameux 0 émotions 0 attentes et 0 engagement – le personnage du livre va trouver le bonheur dans des actes de don, de générosité, d’ouverture gratuite à l’autre. Ainsi, il va transcender ses désirs et se nourrir de manière beaucoup plus riche et équilibrée ; bref, Gounelle est une sorte de nutritionniste des émotions et des comportements 😊, et on sait comment les régimes privatifs ou dissociés sont de bien mauvaises recettes. Loin de bannir les émotions, il suggère juste une production bio, 0 km : faire émerger nos émotions de l’intérieur, par nos pensées, nos actions, nos ressentis. Si dans un autre roman Gounelle utilise les ennéagrammes, et leur concept d’intégration ou désintégration, ici il se réfère aux illusions qui guident les pensées et les actes de chacun. L’illusion du contrôlant est de croire que les gens ne sont pas dignes de confiance. Le condescendant, qui se croit doté d’une grande intelligence et méprise les réactions émotionnelles, vit dans l’illusion que l’intelligence n’est pas à la portée de tous ; ce faisant, il nie l’existence des 3 cerveaux et des formes variées d’intelligence associées : en restant dans l’intellect pur, en n’écoutant pas son cœur, il se prive de ressources utiles pour décoder le monde et vivre pleinement son humanité. L’arriviste, cherchant le bonheur dans le statut, est guidé par son besoin insatiable de reconnaissance, véritable fléau de cette société narcissique où on fait le marketing de sa propre personne… pauvre monde ! Rappelons l’expérience mortelle de faire grandir des bébés sans émotions, sans relations, et si certains pensent encore pouvoir vivre sans dépendre de qui que ce soit, sans rien attendre de personne, il semble que cela soit la plus grande illusion humaine. Et on dirait bien que notre modèle occidental depuis 50 ans, individualiste, orienté produit et possession ait engendré une société mortifère d’humanoïdes clivés, déshumanisés.
Le reste du roman égraine des sujets qui m’intéressent : les blessures émotionnelles et la PNL comme outil pour en guérir, la transe chamanique, le lien entre les hommes dans un champ morphique où vu que l’on est tous reliés, lutter contre les autres revient à lutter contre soi-même ; et une syncrhonicité digne de tout psychologue « quantique » me frappe immédiatement : je découvre, à la lecture en janvier de l’opuscule, une phrase de Marc Aurèle que j’ai utilisée pour mes vœux en décembre 😊… Mumu, Prophète en son petit pays…
Véritable parcours d’éveil positif, le roman semble très éloigné du titre de cette chronique. Et pourtant…. Le livre met en avant un youtubeur, Ryan, qui poste des vidéos moqueuses faites de moments volés et qui connaissent un certain succès. Et là, le cas Griveaux me saute aux yeux, à la plume et au clavier ! Et le pont se fait immédiatement avec un autre ouvrage de Gounelle, Le philosophe qui n’était pas sage. Dans ce roman, beaucoup plus sombre, Gounelle détaille comment le modèle occidental peut choisir délibérément de mettre à mal une communauté épanouie d’indiens d’amazonie. Et trois éléments utilisés font écho à la triple actualité Griveaux/coronavirus/Polanski. En effet, l’un des outils utilisés sciemment pour déstabiliser la société est le conditionnement négatif de tout un peuple à travers des informations délétères assénées à répétition. Le Jungle time de Gounelle est une sorte de BFM aborigène ! Et de voir l’impact sur le moral des êtres humains donne juste envie de résilier ses abonnements ou de créer une chaîne d’informations positives. Griveaux aurait sans doute aimé croire que l’on était tous capables de débrancher les câbles de nos petites lucarnes simplement ouvertes sur une vision restreinte et alarmiste du monde. De là le deuxième outil, de nos jours largement relayé dans notre Jungle Time moderne : introduire un virus pour déstabiliser une société…. Toute ressemblance avec l’actualité est bien entendu … une synchronicité 😊 Et enfin, la destruction des rapports humains, la soumission physique d’autrui et l’appropriation violente du corps d’une femme ne sont pas sans rappeler qu’on laisse s’exprimer artistiquement et que l’on récompense des hommes dénués d’humanité et incapables de le reconnaître pour faire amende honorable. Heureusement, certaines enquêtes, révélations, publications, suicides et condamnations viennent remettre une peu de clarté dans le flou actuel de ce qui est acté au quotidien dans le plus grand déni des possibles conséquences émotionnelles pour les victimes. Et là, le Jungle Time de BFM TV qui montre le tyran déchu du cinéma marcher péniblement avec un déambulateur démonte bien la vice-championne et ainsi bien-nommée de toutes les illusions : l’impunité, le sentiment de toute puissance.
Pour ne pas rester dans le jugement, et désintégrer mon profil réformiste (perfectionniste, rigoureux) en tyran moralisateur, je vais maintenant appliquer un concept cher à Laurent (on devient un peu plus intimes à chaque roman que je lis) : la gratitude. Merci à ces collègues qui m’ont offert / prêté ces supports de développement de mon âme, merci à chacun de mes rencontres de me donner des indices pour développer mon intelligence émotionnelle et merci à chacun de vous de m’offrir des occasions de débrancher le jungle time pour partager un peu plus que des faits divers grivois ou sordides. Et évitant de maudire les ténèbres, je choisis d’allumer ma petite bougie 😊, et continue de chercher le divin en moi plutôt que le diable chez les autres.