Hier, une phrase catastrophique de mon supérieur a ravivé une douleur, clé de la DA ! En gros, il m’a dit que ce serait mieux pour tout le monde si je n’étais pas là ! Et replongée dans cette phrase intériorisée depuis mon enfance, je choisis de partager le fruit de certaines de mes recherches sur la DA, notamment issu des travaux de Lisa Romano.
DA ou co-dépendant ?
Certains thérapeutes français font la distinction entre les deux termes… Les anglophones parlent de codependent, de love addict (addicts à l’amour)…. ou de Self Love Deficit (déficit d’amour de soi, et là on se rapproche déjà un peu du fond du problème). Mon point de vue, français : je préfère utiliser DA, et conserver le terme co-dépendance pour caractériser une dynamique relationnelle….
Comment se comporte un DA, à quoi repère-t-on un DA ?
Le DA type nie ses besoins, et fait passer les besoins et envies des autres avant les siens. Il souffre en silence et pense que c’est sa responsabilité de de sauver et réparer les autres. Il aime faire plaisir, ne sait pas dire non, accepte des relations à sens unique, ne se sent pas assez bien pour mériter l’amour et le respect, a un sens de la culpabilité et de honte exacerbé, adopte les goûts des autres, se conforme à ce que les autres veulent qu’il soit, connaît souvent des addictions (alimentaires ou autres). Le DA recherche la validation, et souvent déçu dans ses relations, se sentira victime de rejet, d’abandon, d’injustice, d’humiliation, de trahison… Le DA préfère éviter les conflits, quitte à renier ses opinions, et son moral dépend de l’ambiance extérieure à laquelle il est très sensible, absorbant les humeurs des autres comme une éponge émotionnelle….
Présupposés, causes et conséquences :
Bien souvent, sous ces comportements se cachent des croyances inconscientes erronées….
« Si je prends soin de toi, tu prendras soin de moi » : et c’est faux !
« Si je ne me plains pas, tu me diras que je suis courageuse », faux encore !
En niant ses besoins, en donnant pour recevoir, le DA attire souvent des vampires …. Et donc ne reçoit rien… En effet, si votre positionnement dans les interactions est d’être nécessaire aux autres, vous allez attirer des gens qui vont avoir besoin de vous, dans une relation de type utilitaire …
Les conséquences sont généralement des relations non épanouissantes, des déceptions en raison des fortes attentes, et un grand sentiment de vide.
Mais l’important est de cerner le vrai problème, et non pas de se concentrer sur les symptômes. Le vrai nœud du problème est une carence identitaire.
Si votre famille était imprévisible, il est fort à parier que vous avez passé votre petite enfance centré sur l’extérieur pour vous assurer que vous étiez en mesure de survivre, donc une enfance passée hors de soi. Quand vous auriez dû sortir pour expérimenter et développer votre autonomie et votre sens du moi, les conditions pour le faire n’étaient peut-être pas réunies, et ressentant une peur du rejet ou de l’abandon, vous avez renoncé. On ne vous a pas enseigné à vous relier à vous-même et aux autres de façon saine, on ne vous a pas appris à développer ces compétences ; au lieu de cela, vous avez appris à acquiescer, à réagir, à faire semblant, à vous réfugier dans des comportements compulsifs et addictifs ….
Et la phrase de mon directeur « ce serait mieux si tu n’étais pas là », a fait très fortement écho à la blessure de rejet, étudiée par Lise Bourbeau, avec cette satanée petite phrase intériorisée « je n’ai pas le droit d’exister, je n’existe pas, ou depuis cet événement je n’existe plus ». Selon Lise Bourbeau, ces pensées sont liées à la blessure du rejet, émanant volontairement ou non du parent du même sexe ou qui a joué ce rôle. Pour Bourbeau, on trouve souvent dans ce schéma l’enfant non désiré ou du sexe non désiré, l’enfant rejeté par sa fratrie à la naissance. Mais on y trouve aussi des personnes marquées par des événements traumatiques et même des événements transgénérationnels (racisme, famille rejetant un de ses membres à cause de son mariage…). Et attention à la notion de trauma, elle n’est pas toujours ce que l’on croit ; un parent qui ne met pas de limites à son enfant lui cause des traumas. Concernant la blessure de rejet, féliciter seulement pour les bonnes notes peut causer un trauma, l’enfant ayant la sensation de recevoir la validation du parent seulement quand il est conforme aux attentes …. De là à « pour mériter je dois être parfait, … » il n’y a qu’un pas… Et comme le précise Lise Bourbeau : il y a un lien entre la façon dont les autres nous traitent, et la façon dont on se traite soi-même… Et le rejet par les autres n’est en fait que la manifestation du rejet de soi …
Comment en sortir ?
La clé est d’identifier le vrai problème. Souvent les thérapeutes parlent de renforcer l’estime de soi, la confiance en soi, l’amour de soi, voire l’affirmation de soi… Mais comment renforcer ce qui n’existe pas ?
La solution est de prendre le temps et de s’autoriser à découvrir peu à peu qui on est …. Qu’est-ce que j’aime vraiment (et non plus qu’est-ce que je dois aimer car mon conjoint l’aime) ? Qu’est-ce que je sens ? Qu’est-ce que je veux ? C’est vraiment créer sa nouvelle identité, compléter son identité développée de manière incomplète. Je me souviens de certains propos dans mon adolescence « tu manques de maturité ». Comment en aurait-il pu être autrement quand je n’avais ni le droit de sentir mes émotions « tu es trop sensible », ni le mode d’emploi pour les gérer, ni le droit de penser (menaces d’expulsion de la maison en cas d’opinion contraire, bref, menace de bannissement du clan, pas vraiment sécurisant comme perspective donc à éviter … ) … Alors à l’âge adulte il faut faire maturer toutes ces compétences émotionnelles, relationnelles, intellectuelles.
Il y a des outils à utiliser, pour prendre conscience de ses comportements et les infléchir. Un accompagnement par une personne au fait du vrai nœud de cette problématique sera de nature à baliser le chemin vers soi ! Je souhaite à tous un beau voyage d’exploration/expansion intérieure !